La Ligue Suisse contre l’Epilepsie a légèrement remanié les directives « Epilepsie et conduite » et assoupli certains points. Les personnes atteintes d’épilepsie pourront continuer de conduire sous certaines conditions.

(Zurich) Un accident mortel survenu à Berlin en septembre a frappé les esprits : le conducteur a probablement  été victime d’une crise épileptique. Une question revient alors, également en Suisse, dans la presse et sur les réseaux sociaux : les personnes atteintes d’épilepsie ont-elles le droit de conduire, d’une manière générale ? Les règles traitant de cet aspect sont-elles adaptées ?

« Les inquiétudes sont compréhensibles après un accident aussi terrible », déclare Prof. Dr méd. Stephan Rüegg, président de la Ligue contre l’Epilepsie. « Toutefois, selon des études actuelles, d’autres problèmes médicaux causent 26 fois plus d’accidents mortels que l’épilepsie. Le risque est par exemple 156 fois plus élevé en cas d’abus d’alcool que d’épilepsie. » [1] Les jeunes conducteurs masculins en parfaite santé présente également un risque bien plus élevé. Dans la perception collective, le risque induit par l’épilepsie est souvent surévalué par rapport à des dangers tout aussi importants, comme le diabète ou des problèmes cardiaques.

Durcissement des règles inutile

La Ligue contre l’Epilepsie ne voit par conséquent aucune raison de durcir ses directives. Au contraire, la Commission de la circulation routière compétente a même légèrement assoupli quelques points dans l’édition de novembre 2019. Les personnes atteintes d’épilepsie pourront d’une manière générale reprendre le volant après une année sans accident.

Prise en compte du traitement par précaution

« Désormais, les limitations peuvent être adapté de façon individuelle pour les personnes qui prennent des antiépileptiques par précaution après une première crise », déclare le président de la Commission, Dr méd. Pierre Arnold de Sion. Dans certains cas, la période d’interdiction peut être réduite, éventuellement jusqu’à un minimum de trois mois. Les personnes victimes de crises uniquement la nuit pourront désormais reprendre le volant au bout de deux ans (et non trois comme jusqu’à présent).

Le passage traitant de l’« épilepsie menaçante » causée par d’autres affections cérébrales telles que des tumeurs, a été supprimé, le risque réel de crise ne pouvant être estimé précisément. « Nous recommandons désormais ici aussi une approche individuelle », dit Pierre Arnold.

Les nouvelles dispositions dans le cadre du programme « Via sicura » ne modifient pas la pratique actuelle : l’avis professionnel d’un neurologue devrait rester décisif.

Des règles strictes pour les professionnels

Rien ne change quant à la rigueur des règles pour les chauffeurs professionnels : dans la plupart des cas, ils devront se réorienter professionnellement une fois le diagnostic de l’épilepsie posé, car la conduite de camions et le transport professionnel de personnes ne seront de nouveau autorisés qu’après une absence de crise depuis 5 ans sans traitement médicamenteux.

La Ligue contre l’Epilepsie regrette le manque d’uniformité des règles au sein de l’Europe – les personnes concernées doivent vérifier qu’elles ont le droit de conduire dans le pays voisin avant de traverser la frontière au volant d’un véhicule. « Nous espérons une collaboration plus étroite en Europe à l’avenir », explique le président de la ligue, Prof. Dr méd. Stephan Rüegg. Dans le cadre du European Congress on Epileptology qui se déroulera en juillet 2020 à Genève, la Ligue contre l’Epilepsie prévoit un symposium traitant du sujet.

[1] Naik PA, Fleming ME, Bhatia P, Harden CL. Do drivers with epilepsy have higher rates of motor vehicle accidents than those without epilepsy? Epilepsy Behav. 2015;47:111–4. https://www.epilepsybehavior.com/article/S1525-5050(15)00168-7/fulltext

Les nouvelles directives sont parues dans le Swiss Medical Forum du 6 novembre 2019 : https://medicalforum.ch/fr/article/doi/smf.2019.08402